Qu’est-ce qui favorise la coopération au sein d’un groupe ?
J’ai posé cette question plusieurs années de suite à des étudiants. Invariablement leur première réponse était : « l’ouverture d’esprit ».
Une sorte de formule magique en somme.
Cela pourrait-il être aussi simple ?
Mais concrètement, ça veut dire quoi être « ouvert d’esprit » ?
La recherche d’une définition permettait d’avancer encore un peu.
En nous appuyant sur les propositions du Petit Robert, nous pourrions définir l’ouverture d’esprit comme une disposition intellectuelle d’un individu qui l’amène à s’intéresser à d’autres avis, à les considérer et à leur attribuer de la valeur, quand bien même ceux-ci pourraient être très différents du sien.
A ce stade, je donnais facilement raison aux étudiants. Il semble raisonnable de penser que la coopération est facilitée si les membres d’un groupe s’intéressent à ce que peuvent apporter les autres, sont capables d’exprimer des points de vue différents et d’être en désaccord sans que cela menace l’intégrité du groupe..
Mais leur réflexion peinait à aller plus loin. Une sorte de fatalisme s’exprimait alors : soit on est ouvert d’esprit, soit on ne l’est pas… Tout le monde n’aurait donc pas eu la chance de tomber dans le chaudron.
Et si finalement il était quand même possible de fabriquer une potion déclenchant l’ouverture d’esprit, quels en seraient les ingrédients ?
Selon moi, des réponses concrètes se trouvent dans le champ de la créativité. Dans ce domaine, l’auteur que j’ai trouvé le plus inspirant, c’est Edward de Bono, aussi connu pour avoir créé la méthode des 6 chapeaux.
Dans son ouvrage « la boîte à outils de la créativité », l’auteur explicite deux concepts incontournables.
La provocation…
… ou l’art de positionner des points en dehors du champ des possibles, en dehors de notre perception et de notre logique. Mobiliser la provocation permet de déclencher la créativité à la demande … sans prendre de drogue cela va de soi, ce qui offre tout de même certains avantages.
Le mouvement …
… ou la capacité de se placer mentalement à l’endroit précis de la provocation, autrement dit en dehors du champ des possibles, parce la vue y est imprenable et que les perspectives qu’elle offre peuvent avoir une valeur incroyable.
Mobiliser la provocation et le mouvement revient à s’exposer à l’altérité et, aussi aberrante soit-elle, s’entraîner à s’ouvrir à elle pour entrevoir des perspectives nouvelles.
C’est un peu comme si on jouait à être ouvert d’esprit … c’est aberrant, mais on essaie, juste pour voir et parce qu’on sait que c’est pour de faux.
On s’entraîne, juste pour voir ce que cela fait… et on est souvent agréablement surpris. Et en plus cette gymnastique mentale marche aussi avec les vrais gens, les humains, comme nous, même avec ceux qui disent vraiment n’importe quoi … enfin c’est ce qu’on pense au début …